Aujourd’hui, je crois que je me pose une question qui peut apparaître bien étrange à beaucoup d’entre vous. C’est une question qui pourra même leur sembler dérisoire, mais qui n’en est pas moins essentielle à mes yeux. Je ne vais pas vous faire lanterner plus longtemps, je la formulerai tout simplement ainsi : Où est donc passé James Bond ?
Je l’admets bien volontiers, mon propos peut en déconcerter plus d’un(e). Et pourtant !… Dans le contexte d’extrême tension internationale que nous connaissons en ce moment (ce qui est un pur euphémisme, pas vrai ?), si seulement nous pouvions mettre la main sur James Bond, les choses pourraient rapidement s’arranger… Toi qui lis ces lignes, tu as certainement vu comment James Bond s’y prenait pour rétablir les situations les plus mal engagées ?
On peut dire qu’il est plutôt efficace ! Pas vrai ? Ça aussi, c’est un doux euphémisme. Je me souviens l’avoir vu attaquer un char d’assaut avec les dents, assommer les méchants qui étaient à bord, s’emparer du véhicule et ainsi, régler son compte au vilain pas beau qui menaçait de déclencher la fin du monde. Tu reconnaîtras que le héros de Ian Fleming est indiscutablement l’homme de la situation… Déjà, il a de l’expérience, le rideau de fer, il le connaît comme sa poche. D’ailleurs, je me souviens qu’il nous avait envoyé ses Bons baisers de Russie. C’était, il est vrai, dans les années soixante, mais il a bien dû conserver quelques contacts sur place, pour lui faciliter la tâche…
S’il te plait, lectrice, lecteur, ne me dis pas qu’ils ne sont peut-être plus tout jeunes, ses contacts… Allez, admettons, mais ce n’est pas grave, je vais procéder autrement.
James (vous permettez que je vous appelle « James » ?), l’heure est grave, si vous êtes tombé sur ce « site d’interné » par hasard, je vous exhorte à reprendre du service ! Nom d’un chien, le sort de la planète est en jeu ! Et au train où ça va, ça risque d’être encore plus rapide que ce que prévoit le GIEC que l’on n’écoute jamais ! Alors, James, bon sang, répondez ! J’ai encore fait votre numéro, pas plus tard qu’il y a dix minutes, comme je le fais plusieurs fois par jour depuis la semaine dernière, et une petite voix me répond que le numéro n’est pas attribué. Pourtant, James, le 007, c’est bien votre numéro, nom d’une pipe !… Vous n’êtes quand même pas aux abonnés absents à cause du Brexit !…
C’est une mission pour vous, James. Il faut vous rendre d’urgence à Moscou. Là, vous prenez le métro et vous descendez à la station Kremlin. Ça doit être indiqué.
Comment ça, ça va pas être facile parce que c’est écrit en cyrillique ?… Evidemment que c’est écrit en cyrillique. Et alors ? On s’habitue à tout. Même moi, quand j’ai voyagé en Grèce, j’ai fini par me débrouiller avec l’alphabet cyrillique. Alors, ce n’est pas ce qui va vous arrêter James !… Bon, je reprends.
Le Kremlin, c’est un hôpital psychiatrique, comme il y en avait plein, du temps de Brejnev. A l’accueil, vous demandez poliment (j’insiste, « poliment » !), la chambre capitonnée de M. Poutine.
Ensuite, James, vous entrez et vous lui administrez son traitement, car, apparemment, il y a longtemps qu’il n’a pas pris ses gouttes, notre Vladimir. Ou alors son logiciel personnel est resté bloqué aux années d’avant l’implosion de l’URSS. Et ça fait un bug monumental. Mais peu importe ! Vous n’êtes pas informaticien, James. Vous vous concentrez sur le traitement à administrer. Une dose unique devrait suffire. Comme pour certains antibiotiques. Voilà, c’est tout, James. On compte sur vous.
Et si l’on ne veut pas vous indiquer la chambre de M. Poutine, eh bien, vous vous débrouillez. Vous êtes James Bond, tout de même !
Evidemment, j’en entends déjà qui cherchent à me ruiner le moral en me susurrant : Euh, Tonton Albert, James Bond, c’est un personnage de fiction ! Il vit dans les romans, et dans les films, mais pas ailleurs… A ces rabat-joies, je répondrai sobrement : Et pourquoi un personnage de fiction ne pourrait-il pas ramener à la raison un véritable personnage de roman d’apocalypse ? Hein ?… Pourquoi ?…
Jusqu’alors, quand on remarquait que quelqu’un avait des courts circuits sous son crâne, on disait de lui qu’il était carrément à l’ouest, on s’aperçoit de nos jours, qu’être franchement à l’est, ce n’est pas mieux. Et au « top 50 » des frappés qui gouvernent ce monde, je trouvais que nous avions un choix étendu, du Brésil à la Hongrie, de la Corée du Nord à la Syrie, en passant par l’Afghanistan ou la Turquie (désolé, je n’ai pas le temps de nommer tout le monde !), un éventail complet d’experts aux facultés de discernement inversement proportionnel à leur taux de testostérone … Et parmi ce choix pléthorique, il est vrai, j’avais plutôt misé sur un certain Donald Trump pour faire basculer l’humanité dans l’irrémédiable, et voilà que surgit l’outsider de la Russie éternelle. Bref, ça sent le roussi, ou la Russie, je ne sais plus trop…
Ça sent aussi le plat réchauffé de la Guerre Froide. Avec la spécialité qui était en vogue à cette époque : la grande frousse à la sauce pétoche. Pour faire court, notre Vladimir qui a l’air de rigoler autant que Buster Keaton, la star du cinéma muet qui ne riait jamais, s’inquiète de voir les anciens pays satellites de feu-l’URSS – les fameux « pays frères » – adhérer les uns après les autres à l’OTAN, l’ennemi juré de jadis et peut-être de demain.
Il faut dire aussi qu’ils n’avaient pas toujours apprécié les « interventions fraternelles » de Moscou, les pays frères ; et à la première occasion, ils ont pris la poudre d’escampette. Quelle ingratitude ! Ah, les querelles de famille !…
Et avec ce côté pince sans rire qui est le sien, hérité de son job au KGB, notre Vladimir rugit, tel un ours nourri avec les restes des prisonniers du goulag :
OTAN, suspends ton vol… de mes territoires d’antan, ou sinon !… D’où ce coup d’arrêt asséné à une Ukraine visiblement tentée de s’émanciper à son tour. En somme, la Russie nous rejoue « Je mets fin au printemps de Prague » à la sauce ukrainienne, histoire de renvoyer la panique dans l’autre camp… Il faut croire que l’épidémie de Covid – dont on ne parle plus guère, précisément en raison de la guerre – aura ouvert la voie de la contagion.
Bon, on s’aperçoit tout de même que les temps ont changé. Du temps de l’URSS, les gens faisaient la queue devant les boulangeries, dans l’espoir de glaner un bout de pain. Aujourd’hui, les Russes font toujours la queue, mais devant les automates des banques, dans le but de récupérer quelques billets qui ne valent plus grand-chose.
Bien malin qui pourra prédire comment ce qui a débuté en 2014, avec l’annexion de la Crimée, s’achèvera. Mais peut-être que depuis longtemps, Dostoïevski a déjà formulé la réponse : qui sait si, dans toute cette épouvantable histoire, « Crimée/châtiment » n’est pas un diptyque réaliste ?
Cette chronique se loge aussi très bien dans vos oreilles, dans une version très légèrement différente. Il suffit pour cela d’aller faire un tour par là, sur le « pot de caste » de Radio G ! Cela commence à 5’23, mais il reste encore 45 mn d’émission que l’on peut bien sûr écouter.
Le numéro que vous avez demandé n’est plus disponible depuis le 24 février 2022.
Néanmoins vous avez la possibilité de faire appel à un nouveau numéro attribué à un certain « RASPOUTINE ».
En effet ce dernier, ressuscité depuis peu saura faire face à l’invasion dont s’agit.
Pourquoi, me dîtes-vous ? Car « RASE POUTINE » :)))
Et pourtant, malgré les apparences, on a bien de la chance …. Si, si !
Imagine un peu que Trump ait encore été aux manettes Outre Atlantique ! Et là, même Bruce Willis n’aurait rien pu faire pour nous. C’est dire …