Nous voici à peine débarrassés du Père Noël que surgit dans le sillage de son traîneau, la période des vœux ! Des vœux par ci, des vœux par là. Des vœux à toutes les sauces. Parfois, j’ai l’impression que je vais devoir avaler, contraint et forcé, du ragoût de vœux. Ah, ne rigole pas, Kevin, on ne se moque pas d’une indigestion !
Tenez, rien que la locution « Meilleurs vœux » me déconcerte. Ça sent le pléonasme à plein nez, non ? Vous n’allez tout de même pas souhaiter vos « pires vœux » à votre entourage ?! Si ?… Nan ? Encore qu’à bien y réfléchir, il est probable que chacun – chacune – pourrait être tenté(e) de le faire. Je suis sûr, même vous qui lisez ces lignes. Même moi, peut-être, qui pourtant ne dis du mal de personne. Bon, à part des… ou encore des… et plus rarement des… aussi.
Hormis le côté répétitif de ce sac de vœux, l’an nouveau dissimule une bonne nouvelle. Pensez donc, DEUX MILLE VINS ! Avec un numéro pareil, si le jus de la treille n’est pas à l’honneur, c’est à désespérer. Deux mille vins. Voilà une année qui devrait produire de grands crus, et qui sait, peut-être de grandes cuites aussi. De là à songer au poète médiéval autant que persan, Omar Khayyâm, il n’y a pas loin. L’ami Omar, qui fut au moins aussi grand penseur qu’il a pu être grand buveur – devant l’Éternel comme devant les plus modestes des temporaires de son époque – n’avait pas son pareil pour mettre les tonneaux en Perse. D’ailleurs, je ne résiste pas à l’envie de lui passer la parole :
Demain je rangerai l’habit de la dévotion, de l’hypocrisie ;
J’ai des cheveux blancs ! je veux boire du vin !
Le chiffre de mes ans a passé soixante-dix !
Quand serais-je heureux si je ne bois pas aujourd’hui ?
Bonne question, n’est-ce pas ?
Je ne sais pas s’ils ont bu, mais il est manifeste qu’ils trinquent beaucoup en ce moment : je veux parler des Australiens. Lors de la COP 25, les représentants du gouvernement australien avaient joué les zélés défenseurs du charbon, dont le sous-sol de leur beau pays regorge. Vous n’ignorez pas que le seul vrai profit est immédiat et que le climat peut attendre. Ce n’est pas un certain député du Maine-et-Loire qui a eu pour Noël une panoplie de Claude Allègre, qui me soutiendra le contraire.
Bref, records de chaleur par ci – on a dépassé les 47 °C près de Sydney dimanche dernier – sécheresse intense et vents violents par là, voilà que patatras, le territoire australien est en passe de se transformer en un gigantesque barbecue. A l’heure où se profile une extinction massive des espèces végétales et animales, l’Australie semble vouloir participer activement à la grande braderie mondiale de la biodiversité. Dans ce domaine, l’Australie est même du genre « tout feu, tout flammes ! ». Je dirais cependant qu’être sur des charbons ardents, ça a ses limites.
Des limites dont s’affranchit la catastrophe en cours, puisqu’elle s’exporte dans une sorte de remake du nuage de Tchernobyl. L’Australie vide en effet ses cendriers jusque sur les glaciers néo-zélandais, situés pourtant à des milliers de kilomètres du premier kangourou calciné. Des glaciers qui se couvrent donc de cendres et qui ont tendance à fondre, accélérant ainsi un processus dont on se passerait volontiers. C’est ballot, car des cendres noirâtres, ça renvoie bizarrement moins bien les rayons solaires qu’une belle étendue immaculée, et par ricochet, ça peut encore faire monter la température. Le cercle vicieux en somme. La nature est décidément mal faite. Elle n’est pas fichue de s’adapter à nos exigences humaines…
Fort heureusement, pour m’aider à oublier la crémation généralisée des koalas et autres ornithorynques, j’ai eu le bonheur de bénéficier des vœux de notre bon président. Il a affirmé que le pays allait entrer dans la décennie. C’est DINGUE, non ? ! Certes, c’est moins solennel qu’une entrée au Panthéon, mais ce n’est tout de même pas ridicule. Tout de suite, avec une telle formule, l’horizon s’est éclaircit. Soudain, je ne redoutais plus rien, ni la retraite à points, ni l’abonnement à la soupe populaire qui sera livré avec… Et donc, ragaillardi par le verbe présidentiel, je me suis mis à fredonner…