La boulette de l’an nouveau

On en dira ce que l’on voudra, les traditions ont la vie dure. Témoin cette bonhommie un rien désuète que nous affichons à l’égard d’une année nouvelle pointant le bout de son nez. Elle bénéficie généralement d’une opinion favorable, malgré les déconvenues rencontrées par le passé – et qui peuvent être nombreuses une fois que nous sommes parvenus à l’âge adulte !… Toutefois, il faut reconnaître que lorsque 2020 vous a précédé, il faut sérieusement s’atteler à la tâche pour faire pire. Pourtant quelque chose en nous nous susurre que c’est parfaitement possible, et que « l’an foiré » pourrait bien céder le champ libre à « l’an pire ».

Cette tendance à l’escalade s’appliquera-t-elle aux boulettes que vous venez, lecteurs, lectrices, déguster sur ces pages ?

Eh bien, j’ai le plaisir de vous apprendre que 2021 s’annonce comme une année fort convenable en matière de boulettes. Au regard de ma toute première récolte de cette année, et pour illustrer mon propos, voici ce que j’ai pu lire au détour d’un dossier présentant un projet de camping :

  • Les deux enfants de M. et Mme G. sont scolarisés à l’école primaire communale et participent activement à la non-fermeture des classes.

Whouaouh ! tout jeunes et déjà activistes. Si ce n’est pas de l’héroïsme précoce, ça s’y apparente étrangement. Que font-ils donc, les deux loupiots des consorts G. pour se montrer aussi actifs ? Ils s’enchaînent aux grilles de leur école, dès qu’un inspecteur d’académie se pointe dans les parages ? Ils distribuent des tracts sur le marché, confectionnent des banderoles ? Ou alors, à deux, ils constituent peut-être ce que l’on dénomme communément une « minorité de blocage » ? Si vous avez des suggestions, ami(e)s lecteurs/trices, n’hésitez pas à m’en faire part.

Quand on atteint un tel niveau dès le début d’un dossier, il n’est pas rare de tomber sur une boulette additionnelle avant d’en atteindre la fin. C’est la théorie « du filon ». Hypothèse confirmée une fois encore avec la merveilleuse phrase suivante :

  • L’activité d’hivernage de caravanes permet de valoriser l’activité touristique tout au long de l’année.

L’auriez-vous imaginé ? Des caravanes qui « roupillent » en garage mort, c’est bon pour le tourisme. Comme quoi, lorsque l’on veut « vendre » quelque chose ne suscitant qu’un intérêt très relatif, il y a toujours moyen. Voilà qui fleure bon l’expert en marketing. Sibeth Ndiaye aurait-elle fait mieux ? Pas si sûr.

Puisque je vous parle de marketing, évoquons donc le petit commerce et ses tracas, tels qu’ils sont appréhendés dans un plan local d’urbanisme :

  • …afin de préserver la dynamique de la centralité et éviter l’évasion du commerce de détail vers la périphérie du centre.

On croyait avoir tout vu avec la quadrature du cercle, et voilà que surgit la périphérie du centre. A quand le milieu des confins ?

Vous avez encore de la place pour un dessert ? Je vous propose quelque chose d’un peu consistant, sinon un chouia indigeste. J’ai trouvé ça dans une étude mettant en évidence une pollution des sols sur un site industriel ; le but du jeu consistant à réaffecter le site pour un autre usage. Mais avant cela, il faut recenser alentour quelles sont les occupations du sol – dont les établissements dits « sensibles » abritant des personnes à la santé fragile -,  afin d’évaluer l’éventuel impact de la pollution observée sur la population. Vue de la fenêtre de ce bureau d’études, cela donne ceci :

  • Comme indiqué par la circulaire du 8 février 2007, les maisons de retraite ne sont pas à retenir comme établissements sensibles compte tenu d’une durée de séjour en moyenne inférieure à 2 ans. Cette circulaire indique également que les cliniques et hôpitaux ne sont pas considérés comme sensibles pour les mêmes raisons (durée de séjour limitée).

Une belle leçon de cynisme, n’est-ce pas ? C’est bien connu, les vieux ne vont pas en EHPAD pour y faire… de vieux os. Quant à l’hôpital, avec le développement de l’ambulatoire, il est sûr qu’il faut vraiment en faire exprès pour y être contaminé par un polluant quelconque. Le personnel qui y travaille par contre… Quel monde merveilleusement solidaire est le nôtre !

 

A bientôt pour de nouvelles boulettes. N’hésitez pas à m’envoyer celles que vous dénichez de votre côté. Elles trouveront leur place dans cette rubrique.

 

 

 

2 commentaires sur « La boulette de l’an nouveau »

  1. Ouais, y’a du lourd et pourtant drôle… la dernière est effectivement assez indigeste, mais n’est-elle pas de saison ???

  2. La dernière boulette est abjecte … Trop épicée d’indifférence bureaucratique à mon goût. Trop arrosée de sauce connerie. Parce que le pire dans cette mixture, c’est qu’il y a un crétin/une crétine quelque part qui l’a écrite sans ciller !
    Parfois, ma colère ressurgit par un biais inattendu …

Répondre à marie-cécile Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *