A-coup fan n°11

As-tu remarqué, mon bon Michel, qu’elle est de retour ? A ta mine circonspecte – une mine qu’à l’autre extrémité du poste tu ne peux toi, auditrice, auditeur, qu’imaginer -, je vois bien que tu te demandes bien de qui je vais bien te parler. Allez, je te donne un indice :

– Tip, tididitip, ti, tidididitip…

Eh oui, Michel, la pluie – la pluie qui fut chantée par le regretté Claude Nougaro – fait son retour ! Après un mois de février particulièrement sec, celui de mars a été bien arrosé et la tendance se poursuit doucement en avril.

(D’ailleurs, comme tu as pu le constater, j’ai quelque peu détrempé la moquette du studio pour cause de trajet effectué à pied, sous l’averse).

Non, Michel, je ne suis pas en train de recycler ce onzième à-coup fan en bulletin météo… En somme, le dicton populaire voulant qu’après la pluie vienne le beau temps, est en train de s’inverser. Mais revenons, si tu le veux bien, à Claude Nougaro et à la si belle chanson qu’il consacra à l’eau qui tombe du ciel. On y retrouve toute la poésie dont il est coutumier, avec ce petit plus qui le caractérise et le distingue de ses collègues, à savoir : les clins d’œil au cinéma.

Claude Nougaro a multiplié les emprunts au septième art, dans ses chansons, à la fois par la technique narrative – de véritables plans de cinoche abondent dans toute son œuvre – mais aussi au travers des références appuyées à certains films. Et « La pluie fait des claquettes » ne fait bien sûr pas exception. Dès les deux premiers vers, Monsieur Claude va convoquer Gene Kelly dans le cultissime « Chantons sous la pluie ».

La pluie fait des claquettes

Sur le trottoir à minuit

A l’inverse de Gene Kelly, Nougaro ne danse pas dans les flaques. Il ne patauge pas dans des caniveaux qui débordent sous l’action de l’ondée, ne prend pas sa douche sous les gouttières. Monsieur Claude est un observateur, un contemplatif :

Parfois, je m’y arrête,

Je l’admire, j’applaudis

Oui, la pluie tourne parfois au pur spectacle. Mais notre natif de Toulouse, ne s’arrête pas là. Toujours sous l’emprise de son leitmotiv cinématographique, Nougaro va nous transformer la pluie en muse. Il va nous la créer féminine en diable, allant jusqu’à l’érotiser, avec cette référence à « L’ange bleu » – Der Blaue Engel, pour les inconditionnel(le)s de la V.O – le film de Josef Von Stemberg.

Aussi douce que Marlène,

Aussi vache que Dietrich,

La pluie aurait-elle en elle un peu de la femme fatale ?…

Ah, petit aparté destiné aux plus jeunes qui nous écoutent. Quand Nougaro nous chuchote « Aussi douce que Marlène », il ne songe qu’à l’inoubliable interprète de « l’ange bleu », et assurément pas à une autre Marlène, ministre de son état, qui a eu la curieuse idée de considérer le magazine « Play boy » comme une tribune dédiée à la cause des femmes. En extrapolant, pourquoi ne pas faire l’apologie des circuits courts chez Amazon ? Fin de l’aparté.

Je disais donc que la pluie, pour Nougaro, perdait sa fonction de phénomène météorologique – sinon de calamité gâcheuse de pique-nique – pour prendre les traits d’une jolie femme. Une femme qui est susceptible de vous entraîner vers quelques déboires…

Elle troue mon bas de laine

Que je sois riche ou pas riche

Mais quand j’en ai ma claque

Elle essuie mes revers

Et m’embrasse dans la flaque

D’un soleil à l’envers

Oh, ce n’est pas très galant ça, Monsieur Claude, ce portrait de la femme dépensière ! A des années-lumière de la ménagère économe épargnant sou après sou, pour le bien-être de sa maisonnée. Et voilà même qu’il enfonce le clou :

J’la suis dans les cloaques

Ou elle claque son argent

Au fait, tu as remarqué, Michel, j’ai beau chantonner, ça n’aggrave pas la météo. Et comme de toute façon, il faut recharger les nappes souterraines, il n’y a pas grand risque à persévérer…

Mais bon, plutôt que de continuer à jouer les premières parties de Claude Nougaro, je préfère passer illico le relais au père de Cécile, sa fille. D’autant que pour la version que j’ai dénichée, Nougaro est superbement escortée d’une pétulante complice qui n’est autre que Madame Dee Dee Bridgewater.

Allez, on écoute Monsieur Claude et Madame Dee Dee.

Et on n’oublie pas non plus d’écouter toute l’émission concoctée par l’ami Michel, non mais !… Même si je n’y interviens qu’à partir de 15’58 ».

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